Galerie
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Exposition TRIP'AFRIK 19 mars au 19 avril 2010 -> les artistes
« Voyager en
Afrique » peut s'envisager de n'importe où. Là où çà s'exprime. Là où il
se passe quelque chose de fort, de puissant, quelque chose qui nous met en
mouvement, qui nous anime. Là où on désire.
J'ai souhaité réunir, dans
cette exposition, le travail et la sensibilité de 9 plasticiens pour qui
l'Afrique se vit, se parcourt intérieurement. Qu'ils en soient issus directement
ou non, ils ont, selon moi, pour point commun, d'entreprendre ce voyage
intérieur qui les conduit aux tréfonds de l'expression. Je pose résolument
comme hypothèse que lorsque nous « creusons » notre expression nous
arrivons nécessairement en terre africaine, Notre terre, Notre histoire, Notre
origine. Et cette régression, au sens psychanalytique du terme, est nécessaire
et salutaire, à l'artiste comme sans doute à l'être humain. Elle interroge,
elle relie, elle donne du sens. Outre
son travail d'inspiration africaine, Picasso n'exprimait-il pas très
clairement, c'est-à-dire avec des mots, son désir de parvenir à dessiner comme
un enfant ? Picasso exigeait de lui cette régression car il savait que là,
résidait sa force d'expression, sa source d'inspiration artistique et peut-être
simplement d'être humain. Point de concept, point de « construction
mentale », point de justification à notre très naturel désir d'expression,
au vivant, à ce qui atteste de notre
existence, de notre présence au monde. Du vécu, du ressenti, du cœur, des tripes,
bref une respiration ! Accepterons-nous alors de vivre pleinement notre
humanité ? Valérie Gérablie
Pour illustrer mon propos, voici quelques textes
recueillis :
Henri
Rousseau, explorateur (dit le Douanier Rousseau 1844-1910)
2010 « BÂLE - Il a peint la jungle sans y avoir jamais
mis les pieds. Ses images de forêts impénétrables, peuplées de tigres et de
serpents, ont été construites à la manière de collages. Douanier parisien de
son métier, Henri Rousseau y juxtaposait des motifs qu'il avait vus en images,
entendus dans des conversations ou simplement imaginés. Cette manière de
procéder en s'affranchissant des règles
de la représentation et de la réalité a fasciné les surréalistes, Kandinsky
et Picasso : elle finissait par créer une vérité encore plus durable, qui s'est
inscrite dans notre mémoire. (...) ».
Picasso et l'Afrique
2006 Evénement à Johannesburg et Cape Town :
une exposition, "Picasso et l'Afrique", dévoile les liens entretenus
par le maître Picasso avec le continent africain. (...)
Voici le texte de Laurence
Madeline, commissaire de l'exposition et conservateur au musée Picasso, paru
dans le numéro 19 de Rézo international (hiver 2006).
« Picasso n'aimait pas voyager : il n'aurait jamais mis les pieds sur
le continent africain. Son Afrique était
ailleurs : chez lui, dans son atelier, chez ses amis artistes, marchands,
collectionneurs ou même ethnologues, dans les vitrines du Musée du Trocadéro à
Paris ou sur les quais du port de Marseille...
Picasso affirmait aussi qu'il
ne connaissait pas l'Afrique. Mais l'Afrique connaît-elle Picasso ?
Ainsi se pose, dans cette
confrontation de deux continents - le "continent Picasso" et le "continent
Afrique" - le double enjeu de cette exposition. Montrer Picasso à l'Afrique. Montrer que Picasso, voyageur immobile aux
yeux immensément ouverts, connaissait l'Afrique. (...)
La seconde entrée révèle les
moments où Picasso a placé sa création sous le signe de l'art africain. De la
réalisation des Demoiselles d'Avignon de 1907 qui fait surgir sur le corps
d'une femme un masque sauvage à celle de sculptures, de 1930 ou de 1950,
mélangeant les techniques, les matériaux.
Les deux itinéraires se
croisent pourtant, car l'art de Picasso est si complexe que l'on ne peut jamais
voir qu'une seule influence dans son œuvre. Quand il semble "primitif", il conserve toujours en mémoire le modèle
classique de l'Antiquité, de la peinture des musées espagnols ou parisiens.
De même que, lorsqu'il peint une odalisque langoureuse, il vient peut-être de
tailler une figure de bois dont la technique et la pose rappellent, bien sûr,
telle ou telle sculpture africaine.
Picasso est un continent,
aussi vaste, mystérieux, riche et contrasté que le continent Afrique.
Jackson Pollock et le
chamanisme
À l'automne
2008, la Pinacothèque
de Paris présente pour la première fois à Paris depuis 26 ans, un ensemble
exceptionnel d'œuvres du peintre expressionniste abstrait Jackson Pollock
inspiré par le chamanisme amérindien. (...).
La fascination éprouvée par
Pollock pour l'art amérindien et ses rituels, ainsi que leur influence sur son
travail n'ont jamais été véritablement étudiées. L'exposition a l'intention de
se pencher sur cette question essentielle. Elle
montre l'idée que Pollock se faisait de l'inconscient comme illustration des
rituels indiens et du chamanisme. Avec des dessins et tableaux importants
puisés dans son travail abstrait et semi abstrait, elle sera la première à
illustrer ses images et ses formes en les comparant à l'imagination chamanique,
dont on ne connaît pas grand-chose, tout en admettant son existence.
Nous savons depuis longtemps que Pollock fut attiré, comme les
surréalistes, par tout ce qui relevait de l'inconscient. (...) Il est sans doute celui qui est allé le
plus loin dans cette recherche.
Il est généralement considéré
que Jackson Pollock voyait les origines
de l'art dans les sources de l'inconscient. Pourtant Pollock lui-même, tout
en l'ayant souvent répété, n'a cependant jamais donné d'explication sur ce qui
relevait de l'inconscient.
Depuis les années cinquante, grâce à la première vague des interprètes
de son travail, il est convenu de penser que son art découlait de son psychisme
propre. (...) Il est maintenant considéré que cette approche très Freudienne ne
voyait l'art de Pollock qu'au travers de ces seuls rêves et fantasmes
quotidiens, ses problèmes et ses douleurs. (...). Pollock a suivi à cette époque
une thérapie Jungienne pendant quatre ans. (...) Cependant, une autre idée
s'impose désormais qui permet d'aller au-delà de cette interprétation. Pendant
les années 30 et 40, l'inconscient
était considéré comme une pensée
relevant du réflexe "primitif ", c'est-à-dire, une conscience
telle qu'il était possible encore de la trouver dans les peuples non-européens.
Pollock
était, à ce titre, particulièrement attiré par cette idée notamment sous
l'impulsion de son ami, l'artiste John Graham, un émigré russe qui combinait
l'art de Picasso avec celui du "primitivisme
" et de l'inconscient.